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Le scénario de vie en Analyse Transactionelle

Renaud Fulconis - Le scénario de vie en Analyse Transactionelle

Nous écrivons, dans notre enfance, le film de notre vie…
un film dont le scénario parfois se répète, inlassablement.

Au long de sa carrière, le psychiatre Eric Berne, père de l’Analyse Transactionnelle, a développé le concept de scénario de vie. Une approche qui est brièvement évoquée dans mon article sur les positions de vie, et à laquelle ont également contribué d’autres Analystes Transactionnels comme le psychologue Claude Steiner¹.

Dans son livre : « Que dites-vous après avoir dit bonjour² », Eric Berne décrit le scénario de la manière suivante :
« Plan de vie reposant sur une décision faite dans l’enfance, renforcé par les parents, justifié par des événements ultérieurs et culminant dans une alternative choisie. »

Ainsi, chaque enfant construit sa propre vision sur la base des informations, verbales et non verbales, qu’il reçoit de l’ensemble des figures affectives et d’autorité composant son environnement. Sans cesse, il teste, observe, explore, découvre le monde. Peu à peu il comprend ce qui est autorisé et ce qui ne l’est pas, si ses besoins sont entendus ou non, dans quelles limites et sous quelles conditions, et cela forge ses croyances. Vers 6 ou 7 ans, l’enfant a une idée de la valeur et de la confiance qu’il peut ou non s’accorder, comme de celle qu’il peut accorder ou non aux autres et au monde dans son ensemble. Une situation qu’il renforce et complète aves des éléments allant dans ce sens. J’aborde ce point en particulier dans mon article sur les biais cognitifs.

Être un parent parfait, mais…

Tous les parents projettent d’une manière consciente ou inconsciente leur vision. Elle est la somme de leur propre scénario, incluant leurs éventuelles frustrations, leurs réussites comme leurs échecs, leurs besoins satisfaits ou non, et bien sûr aussi leurs peurs, leur colère, leurs doutes et leurs joies, et les croyances qui en découlent.

Ces éléments positifs comme négatifs, constituent le socle sur lequel nous construisons notre identité. C’est le bagage avec lequel nous démarrons dans la vie et qui constitue son fil conducteur. Comme l’écrit Eric Berne, « Il s’agit pour l’enfant de la meilleure option possible ». S’il est négatif, il devient alors enfermant, limitant, et peut nous pousser à retomber sans cesse dans un même schéma, parfois tout au long de notre vie. Nous sommes devenus acteur ou actrice du film de notre vie que nous jouons et rejouons, et qui va du joyeux au triste, avec entre deux tous les genres possibles.

Relation parent enfant

Voici des exemples de questions posées par mes client(e)s lors de nos séances de coaching :

– « Pourquoi les partenaires que je rencontre finissent-ils toujours par me maltraiter ? »

– « Pourquoi suis-je le plus souvent incapable de décider ? »
– « Pourquoi ai-je si peur de m’engager ? »
– « Pourquoi suis-je angoissé(e) à l’idée de rencontrer de nouvelles personnes ? »
– « Pourquoi mes rapports avec mes collègues finissent-ils toujours dans le conflit ? »
– « Comment puis-je en être à mon cinquième accident de voiture ? »
– « Pourquoi lui ai-je fait confiance, je me suis encore fait avoir ? »…

Une de ces questions ou une autre du même style sonne familière ?
Peut-être êtes-vous l’acteur ou l’actrice principal(e) d’un film aux nombreux remakes, quasiment identiques, sans que vous ne soyez jamais capable de vous en extraire !

Nous nous enfermons dans ces schémas répétitifs pour une bonne raison : ils nous permettent de conforter notre scénario et la vision que nous avons de nous-mêmes, des autres et du monde dans son ensemble.

Ce qui contribue au renforcement du scénario.

Les injonctions :

Si les permissions se trouvent au bout d’une ligne, les injonctions se situent à l’autre extrémité. Ces dernières, négatives, sont les interdits délivrés par les parents. Elle sont aussi inconscientes, verbales ou non verbales. Mary et Bob Goulding en ont identifiées 12.

« Ne sois pas proche » par exemple, physiquement et affectivement, rend le contact et la proximité avec les autres plus ou moins difficile. Être proche peut signifier se mettre en danger, car cela met à rude épreuve le peu de confiance que je peux m’accorder ou accorder aux autres. Avoir des difficultés à être proche dans l’intimité, à identifier puis exprimer pleinement ses besoins peut être en lien avec cette injonction.

« Ne grandis pas »
, inhibe l’autonomie car elle limite l’accès la maturité, l’indépendance, les responsabilités. Avec cette injonction présente dans mon scénario, je me suis approprié la croyance que je ne peux pas faire des choix, décider, mais aussi par exemple vivre pleinement ma sexualité.

Pour troisième exemple, « Ne ressens pas ». Elle peut être exprimée par : « Ne ressens pas tes émotions ; ou ressens les, mais ne les exprime surtout pas ». Elle contribue au développement du scénario de l’enfant qui notamment, grandit dans une famille ou l’expression des émotions n’est pas acceptée, où les exprimer et même les ressentir est considérée comme une marque de faiblesse.

A noter que pour chaque injonction, il existe une permission.

Les contre-injonctions :

Elles sont des instructions verbales données à l’enfant pour lui permettre d’être heureux, d’être quelqu’un de bien aux yeux des parents ou de réussir en tant qu’adulte. Elles sont donc d’abords nécessaires à la vie avec les autres. Elles peuvent cependant devenir un handicap, quand elles sont le reflet des croyances limitantes des parents, et énoncées comme des vérités indiscutables.
Voici quelques exemples parmi d’autres :
– « Il faut être marié(e) pour être une personne respectable ».
– « Seuls ceux qui travaillent dur peuvent s’en sortir ».
– « Les loisirs, c’est pour les fainéants ».
– « Ceux qui demandent de l’aide sont des faibles ».
– « Ne fais pas confiance aux patrons ».
– « Le gouvernement se moque de nous, et le fera toujours »…

Les attributions :

Il s’agit de caractéristiques, parfois de jugements, évoqués pas nos parents et les figures d’autorité dans leur ensemble pour nous décrire. Dans le développement de l’enfant, et en particulier quand ces attributions sont répétées, elles contribuent à la naissance et au renforcement de croyances sur soi, qui deviennent des certitudes.

– « Tu ne comprends vraiment jamais rien ».
– « La musique n’est décidément pas ton fort ».
– « Tu es nul comme ton oncle ».
– « Tu es toujours été mauvais en Anglais ».
– « Tu es incapable de retenir une leçon ».
– « Tu vas échouer comme à chaque fois ».

Elle peuvent être entendues par l’enfant, quand le parent parle de lui en s’adressant à une tierce personne.

– « Il a encore une mauvaise note, je me demande bien ce qu’il pourra faire dans la vie »…

Le programme (ou prescriptions) :

Inconscient, il est le mode opératoire que l’enfant obtient de ses parents pour mettre en oeuvre dans ses comportements les permissions, injonctions et attributions. Il n’a pas pour objet d’autoriser ou d’interdire. Il donne des informations pratiques sur ce qu’il faut faire ou ne pas faire pour… Cela correspond aux croyances des parents. Des prescriptions qu’ils tiennent eux-mêmes de leurs propres parents.

Pour l’illustrer, imaginons une personne ayant grandi avec l’injonction « Ne grandis pas » et la contre injonction « Pour réussir, il faut bosser sans relâche ». Elle pourra par exemple être très impliquée dans son travail, le faisant passer souvent en priorité, sans pour autant parvenir à décider par elle-même.

Les décisions anciennes :

En fonction de son expérience et des différents messages qu’il a reçu, l’enfant décide de ce qu’il doit faire ou ne pas faire, être ou ne pas être dans sa vie. C’est un compromis destiné à la fois à répondre à ses besoins, tout en répondant aux attentes de ses parents. Cela répond à l’affirmation : « Puisque c’est ainsi je vais faire… je vais m’abstenir de… je vais être… »

Sortir du scénario

Les permissions :

Les permissions rassemblent l’ensemble des messages positifs inconscients d’autorisation. Ils sont exprimés d’une manière verbale ou non par les parents. L’Analyste Transactionnelle Gysa Jaoui, établissait en 1988 la roue des permissions. Une roue dans laquelle ces dernières sont rassemblées en quatre catégories que nous sommes invités à noter par dizaines de %, en allant de 0 à 100.

. Moi et mes sentiments permet de visualiser à quel point je peux accepter, puis exprimer mes émotions ; colère, tristesse, joie et peur.

. Moi et moi rassemble les permissions me concernant, et si je me sens autorisé à avoir du plaisir, de la valeur, être de mon sexe, en bonne santé ou encore exister.

. Moi et les autres regroupe les permissions en lien avec mes rapports aux autres : être important, faire confiance, faire partie, être un enfant ou encore être proche.

. Moi et le monde, permet de visualiser si je m’attribue l’autorisation de grandir, de savoir, de penser et de réussir. Dans ce dernier cas par exemple, l’impression de tout rater est l’illustration d’une faible autorisation à réussir. A l’inverse, une personne qui s’épanouit dans son travail et d’une manière prolongée a l’autorisation de réussir. Elle est bien dans sa fonction et dans ses rapports à ses collègues, mène ses projets à terme et peut changer de situation si l’actuelle se révèle insatisfaisante. Idem pour un sportif qui s’entrainera d’une manière efficace et assidue pour atteindre ses objectifs. S’autoriser à réussir ne l’empêchera pas pour autant de gérer efficacement un résultat insatisfaisant.


ET MAINTENANT ?

En tant qu’adultes, nous sommes le plus souvent indépendants, mais ne sommes qu’exceptionnellement autonomes. Nous sommes attachés à notre scénario qui parfois (ou souvent), nous entrave, nous contraint, nous limite et nous fait tourner en rond. Un travail thérapeutique est le moyen d’identifier clairement son scénario, et en déjouer ses aspects limitants. La répétition des scénarios de vie n’est en effet pas une fatalité.

Le coaching par l’Analyse Transactionnelle tel que je le pratique, permet de se poser sur le « Comment » ? Avec l’accompagnement, vous évoluez de la situation inconfortable et répétitive à laquelle vous êtes confronté(e), vers une situation choisie destinée à ce que vous viviez pleinement votre vie.
Cliquez ici si vous souhaitez en parler avec moi lors d’un échange pouvant déboucher sur une session de coaching.

émotion

Les problématiques rencontrées par mes client(e)s, en lien avec le scénario sont nombreuses et variées.

Voici quelques exemples :
. Sentiment d’abandon ou de rejet.
. Difficultés à s’engager pleinement dans son travail, dans une relation affective ou dans sa sexualité.
. Accumulation d’échecs professionnels ou personnels.
. Difficultés à faire des choix, de surcroit satisfaisants.
. Difficultés à s’extraire de la pression des parents et de leurs attentes.
. Difficultés à prendre du temps libre et à en profiter.
. Insatisfaction récurrente dans ses résultats sportifs…

Quelques pistes !
. Prendre conscience de votre fonctionnement et de vos blocages.
. Vous donner des permissions.

. Identifier et satisfaire vos besoins.
. Vous autoriser à dire non.
. Ne plus « essayer », mais faire en conscience.
. Décider que les choses peuvent changer, maintenant.
. S’autoriser enfin, ou plus largement à…
. Ne plus accepter de…


 

Renaud FulconisPour aller plus loin :

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Je vous invite à consulter la rubrique Questions fréquentes.

 

Suggestions :

Livres

Claude Steiner
¹ Des scénarios et des hommes
Desclée De Brouwer – 2011

Eric Berne
² Que dites vous après avoir dit bonjour ?
Tchou – 1972 pour la version originale, 2006 pour la dernière version

Ian Stewart, Vann Joines
Manuel d’Analyse Transactionnelle
Eyrolles – 1991

France Brécard et Laurie Hawkes 
Le Grand Livre de l’Analyse Transactionnelle
Eyrolles –  2008 – 2014

Jean Cottraux
La répétition des scénarios de vie
Odile Jacob – 2021

Publications

Dmitri I. Shustov, Olga D. Tuchina (traduction Agnès Blondel)
« Theodora » : comment le concept psychologique de scénario de vie reflète le souvenir neurocognitif de l’avenir
Actualités en analyse transactionnelle 2020/4 (n° 172), pages 48 à 69

Richard Erskine (traduction dAgnès Blondel)
Scénarios de vie et schémas d’attachement : intégration théorique et implication thérapeutique
Actualités en analyse transactionnelle 2019/1 (n° 165), pages 27 à 50

Miriam Toth (traduit par Steffi Tarade)
S’occuper de la peur de l’échec : travail avec les concepts de scénario dans la salle de classe
Actualités en analyse transactionnelle 2008/1 (N° 125), pages 38 à 49

Formation

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